Tout randonneur aguerri et passionné sait, que le massif vosgien abrite de nombreuses tourbières, humides et acides. On y trouve également, des prairies marécageuses, tourbeuses même en certains endroits. Les tourbières vosgiennes sont disséminées sur l'ensemble du massif, des Vosges du Nord jusqu'aux Hautes-Vosges cristallines du Sud. Les plus remarquables d'entre elles sont localisées dans les Hautes-Vosges, principalement dans le département des Vosges (88). On en trouve également pas mal sur le versant alsacien des Hautes-Vosges (département du Haut-Rhin, 68). Les tourbières glaciaires sont plus rares et localisées, dans les départements du Bas-Rhin (67) et de la Moselle (57). Chez nos voisins germaniques, les tourbières sont très rares dans le Palatinat, alors qu'il y en a pas mal en Forêt-Noire.
Chez nous, dans le massif vosgien, les plus belles et grandes tourbières, sont situées dans les Hautes-Vosges cristallines (partie Sud du massif), à cheval sur deux départements : le Haut-Rhin (68, en Alsace) et les Vosges (88, en Lorraine). Dans le Haut-Rhin, on trouve pas mal de tourbières humides et acides, occupant de magnifiques cuvettes glaciaires (exemples : Devin, Forlet, Missheimle, Frankenthal, etc). Elles sont situées au pied de massifs montagneux gigantesques, aux altitudes atteignant ou dépassant souvent, les 1300 mètres d'altitude (exemples : le Gazon du Faing, le Tanet, le Hohneck, etc). Dans les Vosges, c'est un petit peu différent : les tourbières sont souvent flottantes, sises en bordure d'un étang ou d'un lac (exemples : Retournemer, Longemer, Lispach, Machais, Ténine, etc). Bien entendu, il existe aussi des tourbières dites en cuvette (Belbriette, Squainfaing) et sur plateau (Rouge Feigne, Artimont, Pourri Faing). Plus loin, en Franche-Comté, dans le département de la Haute-Saône (70), se trouve le célèbre Pays des Mille Étangs, qui regorge de lacs-tourbières. Ne connaissant pas très bien ce secteur, je serai incapable de vous faire une liste des tourbières existantes et visitables. Dans les Hautes-Vosges, l'altitude de ces tourbières, varie entre 800 et 1200 mètres d'altitude, la moyenne étant établie aux alentours des mille mètres. Une exception notable est à signaler, avec le lac-tourbière de Sewen, sis à seulement 500 mètres d'altitude, au pied d'un massif légendaire et que j'adore à la folie : le Ballon d'Alsace (1247 m) !
Il y a également quelques tourbières remarquables, plus au Nord, dans les Vosges Centrales et même, dans les Vosges du Nord (partie mosellane, 57). Dans ce secteur, les tourbières les plus intéressantes, sont celles situées dans les massifs du Champ-du-Feu, du Donon (Salm) et du Schneeberg. Les plus représentatives d'entre elles, sont les suivantes : Champ-du-Feu (plateau), Marais de la Maxe, Rond Pertuis Inférieur et Supérieur, Marais du Glacier, Grafenweiher (Schneematt). Dans les Vosges du Nord mosellanes, l'étang de Hanau possède la plus remarquable tourbière humide et acide, dont la découverte peut se faire par un instructif sentier-passerelle botanique. C'est d'ailleurs l'une des plus connues et fréquentées, de tout le massif vosgien ...
Chez nos chers amis allemands, les tourbières sont beaucoup plus rares dans le Palatinat. Actuellement, je n'en connais que trois : le Pfälzerwoog à Ludwigswinkel, le Stüdenbach à Eppenbrunn, ainsi que le Rohrwoog à Dahn. Par contre, en Forêt-Noire du Nord, il y en a beaucoup plus. Les deux plus célèbres sont celles sur plateaux, de la Hornisgrinde et du Wildsee de Kaltenbronn. L'une occupe le point culminant de la Forêt-Noire du Nord (1163 m) et l'autre, constitue l'un des lieux les plus froids de tout le Bade-Wurtemberg. Les lacs d'origine glaciaire, en cuvette, sont également un élément très marquant, des massifs de la Forêt-Noire du Nord. Dans mon riche répertoire, j'en connais deux en particulier, qui possèdent de superbes radeaux tourbeux : le Herrenwieser See et le Schurmsee. Deux endroits magiques, que j'affectionne tout spécialement, pour leur indescriptible sensation de quiétude et de bien-être ! Dans la Haute Forêt-Noire, entre Freiburg et Basel, à ce jour, je ne connais que deux tourbières d'importance et d'intérêt : le Blindensee, ainsi que la Hinterzartener Moor ...
Témoins privilégiés de la dernière ère glaciaire qu'ait connue notre région, les tourbières humides et acides constituent de véritables musées botaniques à ciel ouvert, abritant une faune et une flore extraordinaire. La tourbe noire, très souvent recouverte de mousses humides (sphaignes) et d'herbes chevelues (carex), sert de refuge, pour plusieurs espèces floristiques rares, plus ou moins sensibles et originales : la canneberge, la linaigrette et surtout, les incroyables droséras ... Qu'elles soient rondes, intermédiaires ou longues, les droséras sont de fantastiques petites plantes carnivores, se nourrissant essentiellement d'insectes imprudents. Mieux connues sous le nom de rossolis, les droséras possèdent des frondes (feuilles), de couleur verte, dont la périphérie est constituée de multiples tiges rouge bordeaux, chacune se terminant par une substance collante (un genre de glue). Elles se trouvent dans certaines tourbières vosgiennes, mais aussi, sur certaines pentes herbeuses humides des hautes chaumes. Elles poussent généralement de mi-mai à fin septembre, selon les conditions climatiques. Les droséras les plus communes dans le massif vosgien, sont celles à feuilles rondes. Leur taille n'excède pas les 2 à 3 centimètres de hauteur, principalement au milieu des sphaignes, ou en bordure des trous d'eau à l'air libre, ou encore, sur de la tourbe noire, nue. Pour pouvoir photographier les droséras le mieux possible et pour ne manquer aucun détail de cette extraordinaire plante, je recommande de mettre vos appareils-photos en mode macro : résultats garantis, pour celles et ceux parmi vous, ayant un bon matériel photographique (pas besoin de reflex numérique ou de téléobjectif, rassurez-vous ! ).
Voici les trois principales espèces, connues et rencontrées dans les Vosges :
- " Drosera Rotundifolia " : droséra à feuilles rondes,
- " Drosera Intermedia " : droséra intermédiaire,
- " Drosera Longifolia " : droséra à feuilles longues.
Hormis les droséras, nos tourbières vosgiennes abritent également, une faune remarquable. Il y a bien sûr, les lézards de plusieurs espèces, les crapauds et les grenouilles, les insectes rampants et volants en tous genres, mais surtout, l'on y déniche de fabuleuses et très esthétiques libellules ... La plus gracieuse d'entre elle est bleue et noire, elle s'appelle agrion jouvencelle ! À l'état sauvage, les libellules sont extrêmement difficiles à photographier, étant donné qu'elles volent quasiment sans arrêt et qu'elles ne se posent que très rarement, principalement sur des brindilles d'herbe. Lorsqu'elles volent, les libellules émettent un bruit d'aile très particulier, reconnaissable entre mille et qui risquera fort d'en surprendre plus d'un, parmi vous ...
Ci-dessous, un florilège de mes meilleures captures de 2014 (album) :
Agrion jouvencelle, linaigrette à une houppe et droséras ...